
Dans cette perspective, développée dans le livre de Raül Romeva, économiste de l’ex gouvernement catalan, Som una nació europea (i una carpeta incòmoda): Catalunya vista des d'Europa – ed. Rosa dels Vents 2014, le problème en Espagne, c’est la concurrence Madrid-Barcelone. Madrid, capitale politique et financière, prend le pas sur Barcelone. Barcelone reste le principal foyer de recherche et d’innovation en Espagne, mais la politique du gouvernement central compromettra cette situation. L'argument des indépendantistes est que ce déséquilibre ne pourra que s’aggraver, au point de rendre sans objet l’autonomie, autour d’une capitale « régionale » rendue sans réel rayonnement au sein d’une Europe Fédérale.
Incompréhensions européennes

Le Gouvernement central n’a jamais voulu reconsidérer sa position. Là sont les causes directes de la crise que traverse l’Espagne. La seule parade des instances politiques catalanes, pour éviter la subordination économique et financière à Madrid, a été de mobiliser les catalans pour une indépendance, sur des bases qui combinaient réalisme économique et sentiments nationaux. Cependant, dans une Europe marquée par la montée des nationalismes réactionnaires, cet indépendantisme constructif ne pouvait être ni compris ni soutenu par les Etats. Certains y ont vu un risque de déstabilisation, surtout dans le contexte inattendu de fragilité de l’axe franco-allemand. La déclaration d’indépendance n’est pas arrivée au bon moment. Le pouvoir central a bénéficié d’appuis de circonstance.
Ne parlons pas ici de résurgence du Franquisme. Le garrot n’a rien à voir avec l’incarcération dans des prisons modernes. Ce que révèle en fait la maladresse et une certaine incompétence à gouverner de l’équipe Rajoy, c’est bien l’incapacité à construire un système éducatif performant, à former des élites politiques responsables et compétentes, qui puissent maîtriser une situation de crise politique.
Un système éducatif indigent

Par son incapacité à construire un système éducatif performant (la seule université espagnole des 150 premières du classement de Shanghai est la privée catalane Pompeu Fabra) l’Etat hypothèque gravement l’avenir des jeunes générations. La seule voie vers la réussite sociale qu’il favorise est celle de la finance facile, de la corruption et de l’abus de biens publics, espagnols et européens.
L’exemple allemand, qui sera sans doute bientôt suivi par l’Italie, montre que le choix d’organisation fédérale de l’état permet d’allier initiative locale et coopération dans un espace politique commun. Une Espagne organisée sur le modèle d’un état Fédéral, apaiserait les tensions intérieures, et surtout contribuerait à faire avancer l’idée d’une Europe fédérale.
Une Espagne fédérale à l’avantage européen
Au-delà du conflit de façade légalité-légitimité, le seul thème qu’abordent les débats médiatiques, il faut comprendre comment la jeune démocratie Espagnole peut atteindre sa maturité, en donnant à tous les citoyens de cet Etat les moyens matériels et intellectuels d’exercer leurs droits, et de s’y épanouir. Une proposition concrète dans ce sens serait la création d’un Fonds national -Fédéral !- d’aide à l’innovation industrielle et technologique, sociale et éducative. Il appuierait les projets innovants de chaque Communauté et aiderait à la diffusion de leurs résultats sur l’ensemble de la Fédération.
*détenu par la Justice depuis le 4 novembre pour sédition, Ndlr.