Né en 1948, disparu en 2020, Bernard Moulin est venu à la linguistique par un détour assez commun… les mathématiques, dont il fut agrégé. Pompeu Fabre, le grand lexicographe catalan, lui-même était chimiste, à la base, a rappelé Domergue Sumien, linguiste aussi et baile du Consèu de la Lenga occitana, lors d’un hommage public que l’Institut d’Estudis Occitans de Provence a rendu à Bernat Moulin samedi 23 septembre 2023 à l’Ostau de Provença d’Aix, sa ville.
Il y enseigna, les mathématiques, donc, le plus souvent à des classes préparatoires post-bac, e parallèlement il participait, avec une discrétion presque absolue, aux travaux de l’Institut d’Estudis Occitans.
Humble autant que rigoureux
Mais encore, et toujours avec humilité et respect, il donnait son avis aux écrivain.e.s qui lui confiaient leur manuscrit. Il ne changeait pas l’écrit, mais signalait les incohérences, qu’elles soient dialectales ou syntaxiques, et avec la retenue que tous lui ont connue et reconnue.
En 2012-2013 il participa durant quelques mois au travail de correction d’Aquò d’Aquí. Sa rigueur, parfois pointilleuse, consistait à chasser ce qui n’était pas attesté. Pour lui, il y avait trois catégories dans l’occitan de Provence écrit : ce qui était attesté par d’autres auteurs sérieux, le reste, et l’incohérent.
Il avait aussi beaucoup écouté Guiu Martin, dont l'érudition du provençal réel a profité à plus d'un au cours des années 1970-2000.
Qui va piano va sano
Bernat Moulin travaillait lentement car il n’affirmait rien que de certain. C’est ce qui fait la richesse de son travail, et c’est aussi ce qui le destinait peu à poursuivre longtemps la collaboration avec un journal par définition sans cesse sur le qui vive. De loin en loin néanmoins, nous le questionnions, quand le doute nous saisissait.
Les divers intervenants, ce samedi à l’Ostau de Provença, ont dressé le portrait d’un homme discret, affable, rigoureux, attentif, auquel il fallait s’attacher pour le comprendre et, derrière sa timidité, saisir toute sa richesse. Joan Saubrement (décédé en 2015), un jour me dit à son propos : « j’ai appris à le connaître, et j’ai bien fait de m’y intéresser, car l’homme est plus grand que ce qu’il veut bien montrer ».
Référent des dictionnaires en ligne
Bien sûr nous laisserons la paroles à d’autres dans notre prochain magazine, pour évoquer et l’homme, et le lexicographe.
En attendant, vous pourrez profiter de son œuvre sur les sites web du Congrés permanent de la langue occitane et de l’IEO Paca.