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Le créole de la Martinique bâillonné

Contrairement à la Corse, la cour administrative n'a pas reconnu à La Martinique que sa langue, le créole, soit co-officielle du français. Il y a dans ces arrêts une interprétation qui va toujours à l'interdiction. Il est donc temps de changer l'article constitutionnel qui sert de prétexte à ce bâillonnement.

Le Tribunal Administratif de Fort-de-France, Martinique, près d’un an et demi après, a annulé le 3 octobre dernier une délibération de 2023 faisant du créole la langue officielle du département, au côté du français.

 

Ainsi, une fois de plus l’article 2 de la Constitution sert à étrangler les volontés d’un pays aux réalités linguistiques et historiques particulières en matière de droit à sa langue.

 








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Belkacem Lounes : « si une Région soutient ses entreprises elle peut soutenir ses langues »

L'Elu régionaliste de Rhône Alpes lance une politique d'aide aux médias


LYON. Rhône Alpes a une situation particulière concernant les langues régionales : si Drôme et Ardèche sont territoires de langue occitane, ailleurs c’est le franco provençal …qui souffre. L‘élu délégué aux Langues Régionales doit d’abord favoriser des conditions minimales pour qu’un tissu associatif soit capable de se fédérer. Quand les pouvoirs publics doivent être volontaristes et interventionnistes pour maintenir la diversité régionale…



Belkacem Lounes est conseiller régional RPS-EELV de Rhône-Alpes (photo XDR)
Belkacem Lounes est conseiller régional RPS-EELV de Rhône-Alpes (photo XDR)
Belkacem Lounes, vous êtes délégué Rhône-Alpes aux Langues Régionales. Quel est votre parcours ?
 
Je suis professeur d’économie et je vis dans l’Isère. Elu en 2010 pour la première fois au Conseil Régional, pour Régions et Peuples Solidaires, et sur une liste EELV, je suis également délégué à l’Enseignement Supérieur. En ce qui concerne la délégation qui nous intéresse ici, nous l’appelons  Comité de Suivi des Langues Régionales. Je préside ce comité qui assure pilotage et suivi de la politique en faveur des langues régionales. Il comporte des élus de chacun des groupes représentés au Conseil Régional Rhône Alpes, des experts et des personnalités de la société civile : une quinzaine de personnes au total.
 
Quels sont les incontournables de votre politiques en faveur des langues régionales présentes sur le territoire ?
 
Nous parlons bien entendu du franco provençal et de l’occitan. Nous agissons dans plusieurs directions. D’une part nous cherchons à renforcer les relations transfrontalières. Pour ce qui est du franco provençal, nous travaillons à une charte transfrontalière et entretenons des relations avec le Valais Suisse et avec la Vallée d’Aoste (Italie), et dans ce cadre nous finançons des projets communs. Idem pour l’occitan, avec le Val d’Aran (Espagne) et le Piémont (Italie).
 
Nous favorisons aussi la relation avec les autres régions françaises, en particulier pour l’occitan, dont les associations sont mieux structurées que celles de défenseurs de l’arpitan. Nous travaillons donc autant que possible avec d’autres Régions comme Provence Alpes Côte d’Azur et Auvergne, mais nous finançons aussi en partie le Cirdoc de Béziers, et certains festivals dédiés à la langue d’Oc. Je contribue aussi à ressusciter la Commission Langues Régionales de l’Association des Régions de France. Avec elle nous espérons faire avancer la protection juridique des langues régionales, par le biais d’une vraie loi.

Redonner du prestige aux langues régionales grâce aux médias

La situation du franco provençal est plus difficile que celle de l'occitan (photo XDR)
La situation du franco provençal est plus difficile que celle de l'occitan (photo XDR)
Tous les défenseurs des langues régionales en France y pensent. Cependant toutes les tentatives d’assurer leur enseignement ou de garantir leur emploi public se heurtent à une réalité : elles sont de moins en moins transmises en famille. Comment la Loi pourrait-elle remplacer leur transmission « naturelle » ?
 
C’est une réalité, mais elle fait suite à une longue période d’exclusion, voire de persécutions. La situation que vous brossez résulte de l’intériorisation du mépris dans lequel ont été maintenus les locuteurs de nos langues régionales. Bien des anciens parlent entre eux en franco provençal ou en occitan mais s’arrêtent net dès que les jeunes arrivent. C’est une erreur de leur avoir inculqué que cela pourrait défavoriser leurs enfants ou petits-enfants. C’est une erreur de ne pas favoriser ainsi leurs aptitudes au plurilinguisme, et c’est une erreur de les couper de ce qui les rattache à une culture de terroirs. J’entreprends quant à moi de valoriser ces langues, et de faire entendre que c’est un « plus ». Pour cela il y a des moyens, et les médias en sont un, car ils peuvent populariser les langues régionales, et ainsi les revaloriser auprès des locuteurs potentiels.
 
Aurez-vous une politique en faveur de l’introduction du franco provençal et de l’occitan dans les médias ?
 
Nous discutons avec une fédération de radios associatives de Rhône-Alpes, ce qui se traduira par une convention de sensibilisation. Puis nous essaierons de faire de même avec les télévisions. L’idée est de financer ces structures pour les aider à faire entrer dans leurs pratiques l’usage des langues régionales : par le biais de la musique, de débats, d’information. Toute promotion, a priori, est bonne à prendre.

Mettre les associations en réseaux

Avez-vous le budget correspondant à vos ambitions ?
 
Avant 2009 et une première délibération en faveur des langues du Conseil Régional, il n’y avait pratiquement rien. Je suis donc parti de très bas en 2010, quelques milliers d’€uros au plus. Nous venons de voter un budget en augmentation, malgré les restrictions que les collectivités locales ont tendance à subir actuellement, et nous disposerons en 2013 de 170 000 € pour mener une politique en faveur des langues régionales. Je suis conscient que c’est encore peu. Mais cela nous aidera à poursuivre un travail de coordination interrégionale, et à encourager un travail collaboratif en Rhône-Alpes. Nous recevons des demandes et des projets depuis que les promoteurs des langues régionales savent que des moyens de les soutenir existent. Les associations doivent s’entendre et travailler de plus en plus ensemble.  D’ailleurs c’est ce que fait la Région.
 
C’est-à-dire ?
 
Nous discutons une convention avec les deux rectorats de Rhône-Alpes : Lyon et Grenoble. J’aimerais qu’on enseigne par exemple dans les cours d’histoire, la réalité linguistique régionale. Je souhaite qu’enfin les écoliers de l’Académie de Grenoble apprennent que le français n’a pas été la seule langue parlée chez eux. Je suis favorable à l’émergence d’écoles bilingues sur le modèle des Calandretas occitanes, mais les projets dépendent de la volonté d’associations et de parents. En tout cas je désire que les Rectorats mettent en place des moyens pédagogiques, et nous mettrons nous des moyens logistiques en rapport. Le but ultime c’est que les écoliers reviennent à la maison avec une langue régionale apprise à l’école  pour la faire partager à leur famille. Pour compléter votre question précédente, je pense que nous pouvons favoriser l’emploi de nos langues régionales demain, de cette façon. 
La meilleure structuration des associations occitanistes leur permet de mieux résister en Rhône Alpes (ici stage en Drôme - photo XDR)
La meilleure structuration des associations occitanistes leur permet de mieux résister en Rhône Alpes (ici stage en Drôme - photo XDR)

Un soutien plus facile pour l'occitan car les associations sont structurées

Vous n’incluez pas les langues issues de l’immigration dans ces projets ?
 
Nous devons les distinguer des langues régionales, inscrites dans l’histoire du territoire. Les langues de l’immigration participent certes de la diversité, mais l’approche de soutien des unes et des autres, doit à mon avis être différente. En particulier quand une langue d’immigration est soutenue dans le pays où elle bénéficie d’une politique d’Etat. Ce n’est pas le cas du franco provençal, qui a besoin d’une aide spécifique.
 
La situation de l’occitan n’est pas forcément enviable, mais celle du franco provençal semble bien pire. Comment appréciez-vous  sa situation ?
 
En effet le réseau associatif, là, est faible. Il n’y a aucun salarié permanent d’aucune association de promotion du franco provençal, ce qui complique beaucoup une politique concertée pour favoriser son emploi. C’est par là qu’il faut commencer. L’ arpitan est mal en point ? Soit ! Alors aidons-le particulièrement pour renforcer l’action des porteurs de la langue. On me reproche parfois de vouloir faire le travail des associations en étant interventionniste. Mais je vois tous les jours l’argent public soutenir des entreprises, par millions d’€uros. Si la Région Rhône Alpes peut être volontariste pour soutenir son tissu d’entreprises, elle peut aussi l’être pour soutenir les langues dont l’usage a besoin d’être incité.  Pour ce qui est de l’occitan notre tâche est plus facile car les structures associatives qui le défendent sont anciennes, structurées et fédérées. C’est un véritable moteur de leur vivacité et les pouvoirs publics voient ainsi leur action de soutien facilitée.
 
Quels sont les projets de votre délégation ?
 
Je tiens à faire entrer les langues régionales de Rhône Alpes dans les médias. Je considère que c’est très important. Par ailleurs nous allons travailler avec le monde économique, pour que la promotion des produits, y compris touristiques, mise sur nos langues régionales. Il faut inciter les opérateurs à valoriser celles-ci. Et puis, il y a l’enseignement. Nous avons besoin que l’Etat ait une véritable politique dans ce domaine, mais les négociations avec lui son difficiles. Il pense en termes d’économies. Or, pour enclencher une politique volontariste, nous voulons créer des emplois d’enseignants. Il faut en passer par là.

Lundi 11 Février 2013
Michel Neumuller




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