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Le créole de la Martinique bâillonné

Contrairement à la Corse, la cour administrative n'a pas reconnu à La Martinique que sa langue, le créole, soit co-officielle du français. Il y a dans ces arrêts une interprétation qui va toujours à l'interdiction. Il est donc temps de changer l'article constitutionnel qui sert de prétexte à ce bâillonnement.

Le Tribunal Administratif de Fort-de-France, Martinique, près d’un an et demi après, a annulé le 3 octobre dernier une délibération de 2023 faisant du créole la langue officielle du département, au côté du français.

 

Ainsi, une fois de plus l’article 2 de la Constitution sert à étrangler les volontés d’un pays aux réalités linguistiques et historiques particulières en matière de droit à sa langue.

 








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Nouveau CD : D'Aqui Dub prépare l’Impermanence …


MARSEILLE / SARAJEVO. Le groupe de musique occitane a puisé dans les eaux des poésies occitane, perse et yougoslave pour continuer ses explorations de la pensée et du son. Arnaud Fromont a créé le groupe en 2001. A l’heure de graver le nouvel album, Impermanencia, il nous parlera des traits fondamentaux de cette aventure, où l’occitan est un port d’attaches, et le drame yougoslave un avertisseur sonore permanent.



Dans une salle du semi sous-sol de la Friche de la Belle de Mai voici deux semaines, puis sur scène au Molotov, une salle de concert proche du Cours Julien, à Marseille toujours, l’accueil du public a été testé.
 
D'Aqui Dub met la dernière main à son nouveau CD, Impermanencia. Arnaud Fromont, Sylvain Bulher, Asmir Sabic et Manuel Castel ont passé beaucoup de temps à choisir les textes, en occitan ou en persan. Puis ils ont enregistré cette musique inclassable. Elle est orientalisante, c’est sûr. Elle fusionne instruments trads et électriques, pour créer des mélopées fortes et envoûtantes.
 
« Parmi nos références il y a Led Zeppelin » annonce Arnaud Fromont. Mais l’éventail ouvert des influences laisse voir bien d’autres inspirations que celle des forgerons du rock n’roll des seventies.
 
Impermanencia met ainsi en musique des textes de Roland Pecout, dont on entendra : « Caminas /dins lo segle maufatan / un rai se miralha / en cada morcèu / dau mond espetat / es ton sol conseu / rebat d’aqueu rai / ton eime montant ».
Daqui Dub après une première séance de "restitution musicale au public" à la Friche de la Belle de Mai (photo MN)
Daqui Dub après une première séance de "restitution musicale au public" à la Friche de la Belle de Mai (photo MN)

Vaccin contre le nationalisme

Car D'Aqui Dub rend compte de ce « siècle malfaiteur ». Arnaud Fromont a créé le groupe en 2001, l’année où, pour la première fois, il met les pieds en Bosnie.
 
La guerre civile est alors finie, mais les cicatrices restent vives. « Ma musique ne doit rien à la Yougoslavie, mais mes amis viennent de là, et leurs histoires sont un vaccin contre le nationalisme ».
 
Aujourd’hui, l’une de ces amies traduit des textes du serbo croate, qui seront chantés en occitan. Tragan est l’ingénieur du son d’Impermanencia, Asmir joue dans le groupe… Les enfants laissés orphelins par ce suicide d’une nation ont grandi. Et voilà qu’ils créent la musique occitane de notre temps.
 
Pour eux « la culture traditionnelle est synonyme de nationalisme, qu’ils rejettent. Ils ont vécu dans un pays où chacun a dû choisir de force une citoyenneté, alors qu’il y avait tant de couples mixtes » explique Arnaud.  « De part et d’autre des frontières créées par la guerre civile, maintenant, on normalise différemment le serbo-croate parlé par tous, afin de pouvoir affirmer que les gens sont différents ».

Une identité qui se construit à travers des choix

La Bosnie (ici Sarajevo), où se rend régulièrement Arnaud Fromont. "Un vaccin contre le nationalisme" (photo XDR)
La Bosnie (ici Sarajevo), où se rend régulièrement Arnaud Fromont. "Un vaccin contre le nationalisme" (photo XDR)
Ce sentiment sera mieux compris, sous la plume de Mesa Selimovic (1910-82) qui eut la prescience des drames à venir.
 
Ce classique yougoslave est un des auteurs chantés dans Impermanencia : « Méprisés à la fois par nos frères et par les nouveaux venus, nous brandissons pour nous défendre la fierté et la haine. Nous avons voulu notre intégrité, et nous l’avons perdue au point de ne plus savoir même ce que nous sommes » (Le derviche et la mort, 1966)
 
C’est dans ce contexte de grande méfiance envers les dérives de la recherche de son « identité » qu’Arnaud Fromont, peut parler de sa musique et de ses influences.
 
« Je suis un Aixois passé à Marseille, à qui on interdisait, petit, de parler avec l’accent, jugé vulgaire. Mais j’ai décidé d’être d’ici ». Il y a au fond de son parcours artistique, un individu et ses choix.
 
Parmi ceux-ci il y a le fait d’être fidèle, à ses amis, et à sa culture en re-construction. L’occitan ? Fondamental, au cœur du projet du groupe. « Il va bien à ma façon de chanter. Le français ne s’adapte pas à ma musique orientalisante ». Ce sera donc l’occitan. N’y voyez aucun refus de la langue française, que ce grand lecteur apprécie, « comme d’autres ».
 
A l’étranger il parle anglais, « la langue de l’Empire, un moyen de communication minimale avec quiconque. » Fonctionnel, pas affectif. « Dans l’antiquité on devait aussi avoir besoin de parler latin sans en être passionné ». 

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L’inspiration orientale de la musique de D'Aqui Dub ? « Je ne me l’explique pas. C’était là, cela m’attirait, j’ai approfondi ».
 
Et bien approfondi. Batterie, guitare basse ou bombarde et bouzouki dialoguent comme le font Occitans et Bosniaques. Le résultat est appréciable. Le dialogue n’est pas le pire moyen d’avancer, sur une trajectoire artistique comme dans la vie.
 
Alors que le mixage d’Impermanencia n’est pas tout à fait terminé, Arnaud Fromont tient à nous en livrer la clé. « Le titre signe la relativité de toute chose, il nous a été inspiré par un texte indien du XIVè siècle, « Parlar amé Josafa », aurait-on pu traduire en occitan, tiré de La vie édifiante de Siddharta, le fondateur du Bouddhisme.
 
Il a beaucoup voyagé, ce texte, jusqu’à être utilisé par les Cathares, dont la filiation avec le bogomilisme est établie. Or, cette dernière religion fut celle des Bosniaques au moyen-âge. Ceux-là étaient déjà en proie aux Croisades, qui échouèrent à éradiquer le bogomilisme. Et la persécution des Cathares renvoie à l’épuration ethnique en Yougoslavie. Tout est relatif, certes, mais tout est dans tout, aussi, pourrait-on dire.
Marseille, la Friche de la Belle de Mai (photo MN)
Marseille, la Friche de la Belle de Mai (photo MN)

Mercredi 19 Mars 2014
Michel Neumuller




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