
Miquèu Montanaro, musicien globe trotter d’expression occitane, grand spécialiste des flûtes du monde et fondateur du Chantier, dédié aux musiques du monde à Correns, en pleine ruralité provençale, descend tout juste de l’avion. Au Québec il a joué et chanté à plusieurs reprises ces textes, parfois dans des lieux très intimes.
Mais la raison principale de ce périple nord américain, c’est la réalisation d’un vieux projet qui lui tenait à cœur, enregistrer les chansons de Gilles Vigneault, ce poète du chant de la vie quotidienne, celui qui, durant les trois glorieuses, décennies de la consommation, s’évertuait, lui, à « vous parler d’amour, gens du pays ».
Dès les années 1970 Gilles Vigneault l'avait encouragé à traduire ses chansons en provençal
« Vigneault est venu chanter à Toulon. J’avais mon billet pour le concert à l’Opéra mais j’avais aussi pu entrer dans la coulisse grâce au concierge qui était un voisin de mes parents. J’écoutais en silence la répétition, impressionné par le personnage, grand, dynamique qui était devant moi ; j’étais seul spectateur à cette heure-là. Et il est venu vers moi, il m’a invité dans sa loge, je lui ai lu la traduction en òc de son poème Silence, et il m’a encouragé à continuer. »
L’eau a coulé depuis, sous le pont de Correns sur l’Argens, et bien plus encore sous le Pierre Laporte Bridge. Quarante-cinq ans après la rencontre, les textes sont prêts, plus fidèles à l’esprit du texte qu’à sa lettre. La prosodie d’une chanson est chose complexe, délicate. « J’ai voulu garder le plus de musicalité possible dans le choix des mots ».
En fait la matière du disque était prête dès 2020… mais la pandémie a tout retardé. Ce n’est donc qu’entre le 9 et le 15 avril derniers que les enregistrements ont été effectués. Résultat, treize chansons – qu’elles portent bonheur à ce travail ! – gravées avec les musiciens québécois Liette Remon, Nadia Delisle et Pierre Langevin.
Comment respecter l'immense artiste tout en existant comme son interprète ?
Miquèu Montanaro qui en a la longue expérience, sait réunir des musiciens et favoriser ces échanges qui font l’originalité d’une création artistique à plusieurs voix. Encore fallait-il vérifier que le résultat fonctionne auprès d’un public. Et c’est ce qui fut fait en petit comité au Québec, au sortir de la résidence durant laquelle l’album a été créé.
Miquèu est revenu en Provence le 22 avril. Il aura beaucoup à faire désormais pour faire naître cet album, c’est-à-dire à le produire et à le distribuer. Après quoi, gens du pays (et d’ailleurs…) serà ben a vos de vos laissar charrar d’amor…