Le nouveau délégué à la langue d'oc fréquente depuis toujours la Val Varaita, vallée occitane d'Italie (photo XDR)
Vous êtes élu local, à Aix, depuis 1983. Et conseiller départemental du canton d’Allauch depuis deux mois. Mais qui êtes-vous, Bruno Genzana ?
Ma mère est Savoyarde, la famille de mon père vient de la Haute Val Varaita (Val Varacho en Alpin), tout près du Queyras, à 14 kms de St Véran, une très belle vallée qui fut française jusqu’au Traité d’Utrecht.
Mes grands-parents paternels ont émigré après la première guerre mondiale. Mon grand-père travaillait déjà l’hiver à Marseille, comme son père…C’était une tradition. En fait nous nous appellerions Gensane, si au moment de l’Unification italienne, le curé n’avait italianisé notre nom.
Je suis très attaché à cette terre. Je retourne souvent à Pontechianale. Sa beauté, mais aussi ses valeurs, comme le travail,le mérite ou la solidarité, ont donné un sens à ma vie.
J’ajoute que ma famille vivait dans la République des Escartons, un précurseur de la démocratie et de l’effacement des frontières, au XVIIè siècle. Mon père, d’ailleurs, quand nous passions la frontière, me disait : « tu verras qu’un jour on ne s’y arrêtera plus ! ». C’était un Européen visionnaire, et moi je suis un Européen convaincu, sans être béat.
Enfin, comme le traité d’Utrecht prévoyait que la langue française resterait celle de notre vallée, redevenue piémontaise, le bilinguisme français-italien était de rigueur dans l’enseignement. Ma grand-mère parlait et écrivait un français remarquable mais dialoguait en famille « à nosto modo ». L’occitan a béni mon enfance et je n’ai qu’un seul regret, c’est de ne pas parler la langue.
Ma mère est Savoyarde, la famille de mon père vient de la Haute Val Varaita (Val Varacho en Alpin), tout près du Queyras, à 14 kms de St Véran, une très belle vallée qui fut française jusqu’au Traité d’Utrecht.
Mes grands-parents paternels ont émigré après la première guerre mondiale. Mon grand-père travaillait déjà l’hiver à Marseille, comme son père…C’était une tradition. En fait nous nous appellerions Gensane, si au moment de l’Unification italienne, le curé n’avait italianisé notre nom.
Je suis très attaché à cette terre. Je retourne souvent à Pontechianale. Sa beauté, mais aussi ses valeurs, comme le travail,le mérite ou la solidarité, ont donné un sens à ma vie.
J’ajoute que ma famille vivait dans la République des Escartons, un précurseur de la démocratie et de l’effacement des frontières, au XVIIè siècle. Mon père, d’ailleurs, quand nous passions la frontière, me disait : « tu verras qu’un jour on ne s’y arrêtera plus ! ». C’était un Européen visionnaire, et moi je suis un Européen convaincu, sans être béat.
Enfin, comme le traité d’Utrecht prévoyait que la langue française resterait celle de notre vallée, redevenue piémontaise, le bilinguisme français-italien était de rigueur dans l’enseignement. Ma grand-mère parlait et écrivait un français remarquable mais dialoguait en famille « à nosto modo ». L’occitan a béni mon enfance et je n’ai qu’un seul regret, c’est de ne pas parler la langue.
"Je suis porté sur la médiation, je crois à la concertation, mais sans angélisme"
Pour Bruno Genzana, "les porteurs d'opinions divergentes doivent s'exprimer, mais en se respectant mutuellement" (photo MN)
Disons-le clairement, cette délégation n’est pas simple. Vous devrez composer avec des familles régionalistes différentes, sinon divergentes. Or, cette délégation, vous l’avez demandée. Qu’est-ce qui vous a motivé ?
Notre langue me touche au cœur, à l’âme. Avec les bouleversements territoriaux qui se profilent, la langue est notre fil conducteur identitaire, à travers les chamboulements.
Certains élus et responsables associatifs, aussi, m’ont sollicité pour que cette délégation ne disparaisse pas. Pour ceux-là ma capacité à la concertation, mon caractère modéré, ont semblé un avantage et une garantie.
Je suis par ailleurs délégué à l’Agenda 21. C’est le premier rapport que l’Assemblée Départementale a eu à débattre ; plusieurs de mes collègues ont exprimé en séance publique leur satisfaction à me voir conduire cette politique publique en insistant sur mes qualités de dialogue et de consensus.
Je retiens la réponse que Martine Vassal, la Présidente du Département, leur a faite à mon endroit : « Chez Bruno Genzana, l’union c’est inné ». Je l’ai vécu comme un vrai compliment, c’est un fait, mon tempérament me porte à la médiation et à la recherche des équilibres.
Vous serez cependant confronté à des groupes de pression portés sur l’ukase et l’intervention agressive…
J’espère cependant amener les porteurs d’opinions, même contradictoires, à se respecter. Pas d’angélisme ! Le fait de se mettre autour d’une table ne règle pas tout.
Et être à l’écoute ne signifie pas manquer d’esprit de décision.
Vous observerez que, dans la définition de ma délégation, elle s’appellera bien « Langue d’Oc et Traditions Provençales ». Il n’y aura pas de « s » à « langue ».
Notre langue me touche au cœur, à l’âme. Avec les bouleversements territoriaux qui se profilent, la langue est notre fil conducteur identitaire, à travers les chamboulements.
Certains élus et responsables associatifs, aussi, m’ont sollicité pour que cette délégation ne disparaisse pas. Pour ceux-là ma capacité à la concertation, mon caractère modéré, ont semblé un avantage et une garantie.
Je suis par ailleurs délégué à l’Agenda 21. C’est le premier rapport que l’Assemblée Départementale a eu à débattre ; plusieurs de mes collègues ont exprimé en séance publique leur satisfaction à me voir conduire cette politique publique en insistant sur mes qualités de dialogue et de consensus.
Je retiens la réponse que Martine Vassal, la Présidente du Département, leur a faite à mon endroit : « Chez Bruno Genzana, l’union c’est inné ». Je l’ai vécu comme un vrai compliment, c’est un fait, mon tempérament me porte à la médiation et à la recherche des équilibres.
Vous serez cependant confronté à des groupes de pression portés sur l’ukase et l’intervention agressive…
J’espère cependant amener les porteurs d’opinions, même contradictoires, à se respecter. Pas d’angélisme ! Le fait de se mettre autour d’une table ne règle pas tout.
Et être à l’écoute ne signifie pas manquer d’esprit de décision.
Vous observerez que, dans la définition de ma délégation, elle s’appellera bien « Langue d’Oc et Traditions Provençales ». Il n’y aura pas de « s » à « langue ».
"La tradition est un facteur d'intégration"
Les festivals de folklore continueront à être subventionnés par le CD13 (photo XDR)
Pourquoi ne pas avoir gardé l’ancienne dénomination : « Culture provençale et langue d’Oc » puisque cela revient au fond au même ?
Il était nécessaire d’éviter toute ambiguïté avec la délégation « Culture » de Sabine Bernasconi, qui ne souhaitait pas de confusion. Il s’agit d’une question de cohérence. Le volet provençal doit cependant être valorisé, d’où cette délégation.
Adjoint au maire d’Aix, délégué au Tourisme, je portais déjà un grand intérêt à nos traditions, qui sont une chance et des atouts pour le présent. La tradition est un facteur puissant d’intégration.
Et faire partager les valeurs que portent nos traditions renforce la cohésion dans notre société, trop déshumanisée à mon goût.
Quelles seront les grandes lignes de votre action à venir ?
Pour l’heure je reçois les acteurs, associatifs en particulier. J’ai déjà reçu le Capoulié du Félibrige, et verrai très vite d’autres structures importantes. Il s’agit de me faire une idée des façons de voir. Pour être franc, je n’envisage pas de grande révolution. La ligne actuelle sera prolongée, avec des évolutions. En particulier des initiatives en matière de pédagogie donneront lieu à des annonces nouvelles à la rentrée. Pour l’heure je reçois, et parfois des gens aux opinions réellement très tranchées. Il faut faire avec…
Cela peut être violent, avec demande d’exclusion.
C’est le problème des dogmes, les opinions sont alors plutôt des croyances. Pour moi, toute opinion mérite respect, mais ne doit pas s’exprimer au détriment des autres. Voilà ma ligne de conduite.
Il était nécessaire d’éviter toute ambiguïté avec la délégation « Culture » de Sabine Bernasconi, qui ne souhaitait pas de confusion. Il s’agit d’une question de cohérence. Le volet provençal doit cependant être valorisé, d’où cette délégation.
Adjoint au maire d’Aix, délégué au Tourisme, je portais déjà un grand intérêt à nos traditions, qui sont une chance et des atouts pour le présent. La tradition est un facteur puissant d’intégration.
Et faire partager les valeurs que portent nos traditions renforce la cohésion dans notre société, trop déshumanisée à mon goût.
Quelles seront les grandes lignes de votre action à venir ?
Pour l’heure je reçois les acteurs, associatifs en particulier. J’ai déjà reçu le Capoulié du Félibrige, et verrai très vite d’autres structures importantes. Il s’agit de me faire une idée des façons de voir. Pour être franc, je n’envisage pas de grande révolution. La ligne actuelle sera prolongée, avec des évolutions. En particulier des initiatives en matière de pédagogie donneront lieu à des annonces nouvelles à la rentrée. Pour l’heure je reçois, et parfois des gens aux opinions réellement très tranchées. Il faut faire avec…
Cela peut être violent, avec demande d’exclusion.
C’est le problème des dogmes, les opinions sont alors plutôt des croyances. Pour moi, toute opinion mérite respect, mais ne doit pas s’exprimer au détriment des autres. Voilà ma ligne de conduite.
"Les collectivités locales devraient s'entendre pour financer ensemble des projets sur plusieurs années"
Le budget de votre délégation avoisine aujourd’hui les 450 k€, mais finance aussi bien des associations agissant pour la langue d’oc que d’autres. Cet équilibre-là va-t-il bouger ?
C’est un équilibre délicat. Il ne pourra être modifié d’un coup même s’il y aura des évolutions. Il ne faut pas être excessif en la matière. La langue n’est pas le seul critère : les festivals de folklore de Martigues et de Château-Gombert doivent pouvoir continuer à jouer leur rôle et déployer leur créativité, mais cela a un coût, qu’il faut assumer.
Et en même temps, dans ce concert d’initiatives, il y a de « petits instruments » qu’on remarque moins, et qui pourtant sont indispensables à l’ensemble. Donc, je serai très attentif aux petites structures. Je sais la somme d’énergie que suppose de faire vivre une association modeste.
Mon souci en la matière, ce sera de concerter avec les autres collectivités pour nous entendre sur l’intérêt d’un projet associatif et convenir de l’aider ensemble. Nous pourrions alors nous entendre pour aider un projet sur plusieurs années, et donc le sécuriser. Je pense appliquer cet accompagnement d’énergie également aux projets émergeants.
Etes-vous en mesure de dire que le budget de votre délégation sera a minima conservé ?
Nous discutons avec Sabine Bernasconi, qui a une vision globale, de ce qui doit dépendre du budget de sa délégation et de la mienne. Les 450 000€ de ma délégation, par les temps qui courent, ce n’est pas si mal.
Je n’aurais pas voulu d’une délégation sans moyens. La majorité du CD13 en convient. Parce que notre démarche a de l’avenir. On le verra vite d’ailleurs, puisque la présidente Vassal a lancé, à mi-juin, des « Etats Généraux de Provence ». Vos lecteurs pourront y exprimer leur avis et leurs envies !
C’est un équilibre délicat. Il ne pourra être modifié d’un coup même s’il y aura des évolutions. Il ne faut pas être excessif en la matière. La langue n’est pas le seul critère : les festivals de folklore de Martigues et de Château-Gombert doivent pouvoir continuer à jouer leur rôle et déployer leur créativité, mais cela a un coût, qu’il faut assumer.
Et en même temps, dans ce concert d’initiatives, il y a de « petits instruments » qu’on remarque moins, et qui pourtant sont indispensables à l’ensemble. Donc, je serai très attentif aux petites structures. Je sais la somme d’énergie que suppose de faire vivre une association modeste.
Mon souci en la matière, ce sera de concerter avec les autres collectivités pour nous entendre sur l’intérêt d’un projet associatif et convenir de l’aider ensemble. Nous pourrions alors nous entendre pour aider un projet sur plusieurs années, et donc le sécuriser. Je pense appliquer cet accompagnement d’énergie également aux projets émergeants.
Etes-vous en mesure de dire que le budget de votre délégation sera a minima conservé ?
Nous discutons avec Sabine Bernasconi, qui a une vision globale, de ce qui doit dépendre du budget de sa délégation et de la mienne. Les 450 000€ de ma délégation, par les temps qui courent, ce n’est pas si mal.
Je n’aurais pas voulu d’une délégation sans moyens. La majorité du CD13 en convient. Parce que notre démarche a de l’avenir. On le verra vite d’ailleurs, puisque la présidente Vassal a lancé, à mi-juin, des « Etats Généraux de Provence ». Vos lecteurs pourront y exprimer leur avis et leurs envies !
Entretien relu par l'interviewé avant publication, à l'exception du titre, des intertitres et des légendes des photos.