Pèire Brechet : "les amendements clefs n'ont jamais été présentés aux députés" (photo MN)
La France ne signera pas la Charte européenne des langues minoritaires, sur laquelle elle s’était engagée à minima. Et la Loi de Refondation de l’Ecole a été adoptée sans aucun amendement favorable aux droits à l’apprentissage des langues régionales. Quelle est votre réaction ?
Le fait marquant de cette discussion législative c’est au fond que les amendements qui auraient dû permettre l’avancée de l’enseignement des langues régionales en France n’ont pu être soumis au vote des députés. C’est une mauvaise surprise pour l’enseignement de nos enfants. C’est aussi une mauvaise surprise quant au niveau de la démocratie en France.
En quoi la démocratie parlementaire aurait-elle été bafouée à propos de la discussion sur la Loi Peillon ?
Parce qu’elle n’a pas pu être discutée, justement. Tous les amendements, préparés par certains députés, qui visaient à donner un droit à l’enseignement des langues de France ont été repoussés dès avant la discussion.
C’est un sacré déni de démocratie. Je m’explique, dans le processus parlementaire, il y a une phase de discussion préalable aux débats. En fait, les amendements passent par le bureau des Lois à l’Assemblée Nationale qui les trie en fonction de leur cohérence avec le projet soumis aux députés.
Or, dans le cas de la Loi Refondation de l’Ecole, les amendements visant à donner des droits à l’apprentissage des langues ont effectivement été approuvés par ce bureau, et pourtant ne sont jamais parvenus à la discussion. Il semble que ce soit le Conseil d’Etat qui ait, pour d’obscures raisons, mis son veto.
D’obscures raisons ?
Cette attitude en dit long sur le niveau de notre démocratie. Mon intime conviction est que c’est par pure idéologie jacobine que les amendements progressistes ont disparu. Il existe une crainte, une haine des langues régionales, qui s’exprime hors des hémicycles en France. Nous en avons vu ici l’expression.
Et je trouve que c’est grave. Grave pour le droit de cité du breton, du catalan ou de l’occitan entre autres, mais grave aussi sur ce que le citoyen français peut attendre de sa représentation nationale. On voit qu’il est possible de la bafouer. L’attitude des censeurs est irrationnelle, elle est, en tout cas je le pense, idéologique.
Le fait marquant de cette discussion législative c’est au fond que les amendements qui auraient dû permettre l’avancée de l’enseignement des langues régionales en France n’ont pu être soumis au vote des députés. C’est une mauvaise surprise pour l’enseignement de nos enfants. C’est aussi une mauvaise surprise quant au niveau de la démocratie en France.
En quoi la démocratie parlementaire aurait-elle été bafouée à propos de la discussion sur la Loi Peillon ?
Parce qu’elle n’a pas pu être discutée, justement. Tous les amendements, préparés par certains députés, qui visaient à donner un droit à l’enseignement des langues de France ont été repoussés dès avant la discussion.
C’est un sacré déni de démocratie. Je m’explique, dans le processus parlementaire, il y a une phase de discussion préalable aux débats. En fait, les amendements passent par le bureau des Lois à l’Assemblée Nationale qui les trie en fonction de leur cohérence avec le projet soumis aux députés.
Or, dans le cas de la Loi Refondation de l’Ecole, les amendements visant à donner des droits à l’apprentissage des langues ont effectivement été approuvés par ce bureau, et pourtant ne sont jamais parvenus à la discussion. Il semble que ce soit le Conseil d’Etat qui ait, pour d’obscures raisons, mis son veto.
D’obscures raisons ?
Cette attitude en dit long sur le niveau de notre démocratie. Mon intime conviction est que c’est par pure idéologie jacobine que les amendements progressistes ont disparu. Il existe une crainte, une haine des langues régionales, qui s’exprime hors des hémicycles en France. Nous en avons vu ici l’expression.
Et je trouve que c’est grave. Grave pour le droit de cité du breton, du catalan ou de l’occitan entre autres, mais grave aussi sur ce que le citoyen français peut attendre de sa représentation nationale. On voit qu’il est possible de la bafouer. L’attitude des censeurs est irrationnelle, elle est, en tout cas je le pense, idéologique.
Un préfet peut désormais annuler l'aide des Régions à l'enseignement des langues régionales
Le président du Sénat, Jean-Pierre Bel, fera t'il montre d'autorité pour que les amendements soient soumis aux Sénateurs ? (photo XDFR
Que disaient les amendements en question ?
C’est très simple, pour l’essentiel ils rajoutaient « langues régionales » à chaque mention de la langue française ou des langues vivantes, dans le texte de loi.
Clairement, les langues de France n’ont pas plus de droits à l’issue de ce débat parlementaire qu’auparavant.
C’est pire ! Elles ont moins de droits. Puisque toute référence aux langues régionales a disparu du texte législatif, l’apprentissage du corse, de l’occitan ou de l’alsacien a disparu des textes. On ne trouve même plus mention des langues régionales là où le texte de loi cadrait l’intervention des collectivités régionales. Autrement dit, un préfet aujourd’hui peut décider d’exiger d’un Conseil Régional qu’il retire ses aides à l’enseignement.
Il devient théoriquement possible de considérer que les cours de langue régionale n’ont pas avoir lieu durant le temps scolaire. Cela va très loin. Cette loi devait consacrer le droit de cité des langues de France à l’Ecole, elle met au contraire celles-ci en état d’insécurité permanente. Il s’agit d’un recul. Et d’un grand ! Nous voici revenus avant la Loi Deixonne de 1951.
Situation perdue ?
Heureusement pas tout à fait. Le texte doit passer au Sénat ; nous avons écrit au président Jean-Pierre Bel. Je vous rappelle qu’il était en tête de la manifestation du 30 mars à Toulouse. Il précédait les 30 000 manifestants qui appelaient de leurs vœux une Loi mettant l’occitan dans l’univers du droit. J’espère qu’il ne se déjugera pas. Nous le lui avons demandé. Il appartient maintenant à chaque association, voire à chaque citoyen engagé de s’adresser à son sénateur pour lui demander de faire revenir ces amendements à la discussion.
Que va faire l’IEO ?
J’ai signé un communiqué appelant à la mobilisation dès l’adoption de la loi au Parlement. Celle-ci pourra prendre plusieurs formes et l’initiative est laissée aux groupes locaux. Il s’agit d’organiser la protestation, qu’elle passe par les réseaux sociaux ou d’éventuelles manifestations.
Pour ce qui est de l’IEO vous savez que nous n’agissons pas seuls mais dans le cadre de la coordination Anem Òc. Nous allons donc commencer par discuter de ce qu’il y a lieu de faire au cours d’un Conseil d’Administration de l’IEO, et concerter les autres composantes d’Anem Òc. Nous ne devons pas nous précipiter mais organiser une réponse efficace.
C’est très simple, pour l’essentiel ils rajoutaient « langues régionales » à chaque mention de la langue française ou des langues vivantes, dans le texte de loi.
Clairement, les langues de France n’ont pas plus de droits à l’issue de ce débat parlementaire qu’auparavant.
C’est pire ! Elles ont moins de droits. Puisque toute référence aux langues régionales a disparu du texte législatif, l’apprentissage du corse, de l’occitan ou de l’alsacien a disparu des textes. On ne trouve même plus mention des langues régionales là où le texte de loi cadrait l’intervention des collectivités régionales. Autrement dit, un préfet aujourd’hui peut décider d’exiger d’un Conseil Régional qu’il retire ses aides à l’enseignement.
Il devient théoriquement possible de considérer que les cours de langue régionale n’ont pas avoir lieu durant le temps scolaire. Cela va très loin. Cette loi devait consacrer le droit de cité des langues de France à l’Ecole, elle met au contraire celles-ci en état d’insécurité permanente. Il s’agit d’un recul. Et d’un grand ! Nous voici revenus avant la Loi Deixonne de 1951.
Situation perdue ?
Heureusement pas tout à fait. Le texte doit passer au Sénat ; nous avons écrit au président Jean-Pierre Bel. Je vous rappelle qu’il était en tête de la manifestation du 30 mars à Toulouse. Il précédait les 30 000 manifestants qui appelaient de leurs vœux une Loi mettant l’occitan dans l’univers du droit. J’espère qu’il ne se déjugera pas. Nous le lui avons demandé. Il appartient maintenant à chaque association, voire à chaque citoyen engagé de s’adresser à son sénateur pour lui demander de faire revenir ces amendements à la discussion.
Que va faire l’IEO ?
J’ai signé un communiqué appelant à la mobilisation dès l’adoption de la loi au Parlement. Celle-ci pourra prendre plusieurs formes et l’initiative est laissée aux groupes locaux. Il s’agit d’organiser la protestation, qu’elle passe par les réseaux sociaux ou d’éventuelles manifestations.
Pour ce qui est de l’IEO vous savez que nous n’agissons pas seuls mais dans le cadre de la coordination Anem Òc. Nous allons donc commencer par discuter de ce qu’il y a lieu de faire au cours d’un Conseil d’Administration de l’IEO, et concerter les autres composantes d’Anem Òc. Nous ne devons pas nous précipiter mais organiser une réponse efficace.
Occuper le terrain face aux censeurs
Vincent Peillon. La Loi qui porte son nom a donné lieu à un exercice de démocratie sélective selon Pèire Brechet (photo XDR)
Allez-vous demander aux membres du Comité Consultatif des langues régionales, à peine installé, de démissionner ?
Surtout pas. Il s’agit de gens qui ont une compétence mais ne sont pas des idéologues. Qu’ils fassent leur travail de recommandations à la ministre de la Culture, ainsi qu’elle l’a demandé. Qu’ils occupent la place. Il n’y a aucune raison d’aider les censeurs à exclure les langues de France du débat en France.
Que diriez-vous aux responsables, anonymes selon vous, qui ont pu empêcher la discussion des amendements favorables aux langues de France ?
Exprimez vos non-dits ! Dites en quoi l’Etat devrait avoir peur des langues régionales. Exprimez vos arguments, afin qu’une discussion puisse avoir lieu. Ne cherchez plus à détruire les langues de France en catimini. Une nation responsable ne peut-elle discuter ouvertement des droits de ses citoyens ?
Surtout pas. Il s’agit de gens qui ont une compétence mais ne sont pas des idéologues. Qu’ils fassent leur travail de recommandations à la ministre de la Culture, ainsi qu’elle l’a demandé. Qu’ils occupent la place. Il n’y a aucune raison d’aider les censeurs à exclure les langues de France du débat en France.
Que diriez-vous aux responsables, anonymes selon vous, qui ont pu empêcher la discussion des amendements favorables aux langues de France ?
Exprimez vos non-dits ! Dites en quoi l’Etat devrait avoir peur des langues régionales. Exprimez vos arguments, afin qu’une discussion puisse avoir lieu. Ne cherchez plus à détruire les langues de France en catimini. Une nation responsable ne peut-elle discuter ouvertement des droits de ses citoyens ?