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L’ombra messatgièra, Lo fraisse...avec ces titres chantés sur des airs folks qui tirent sur la ballade, guitare en mains, Cécile Collardey avait conquis le public arlésien le 14 juillet 2017. Catherine Gerault et Jean Colomina ont un goût sûr et en invitant son groupe Cylsee au festival Convivència, ils savaient faire découvrir une personnalité et un projet artistitique. La personnalité n’est pas violente, ni même extravertie, l’artiste n’est pas occitane non plus. Cécile chante dans une langue étrangère, qui simplement lui a plu, en lisant Max Rouquette, découvert dans un livre d’images du photographe Georges Souche.
Ce matin, la jeune femme a laissé la guitare dans un coin, a enfilé le survêtement et est partie courir une demi-heure en forêt, Meudon-la-Forêt, la bien nommée, en lointaine banlieue sud de Paris. “Quand j’arrête je fais le silence et enregistre les chants d’oiseaux, je photographie les campanules qui foisonnent en ce moment”. Cécile recharge les batteries. Elle doit quelques heures en télétravail pour le centre culturel japonais dont elle est documentaliste. Puis, il sera temps de composer, encore.
Un second disque est en préparation.
Rencontre de hasard mais passion viscérale
En 2017 elle avait autoproduit L’ombra messatgièra, en réunissant neuf titres en occitan, vénitien, anglais et castillan autour des poésies de Max Rouquette. Enregistré dans un garage, il n’en est pas moins abouti.
Et puis elle espère pouvoir chanter en public, seule ou avec ses compagnons Goran, Rachid, Marine...si toutefois la sortie de crise sanitaire l’extrait de son deux pièces cuisine de banlieue où “il ne m’est pas possible d’enregistrer ou de vraiment travailler sans l’imposer à mes voisins”.
Alors elle interpréterait Rouquette pour le public parisien du Connétable, celui du Couvent des Ursulines, et descendrait à Béziers, deux fois au moins avant l'automne. Mais il est possible qu’elle doive y renoncer, comme elle a du renoncer à trois autres récitals en avril et mai.
Mais revenons en arrière. Cécile qui parle anglais, japonais et espagnol, “baragouine le suédois, le hongrois et l’occitan”, chez un ami ouvre un livre de photographies. Le lac de Salagou, de Georges Souche, ne laisse pas indifférent : le photographe des paysages embrumés et des lumières aux multiples nuances a voulu agir en poète admiratif de la puissance du lieu, et y offre le regard de Max Rouquette (1908-2005), la grande voix occitane du XX ème siècle, lui même paysagiste, mais de la parole écrite et déclamée.
Prononcer l'occitan, un défi
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“Quel hasard ce fut! J’ai senti que cette langue totalement inconnue avait à voir avec moi, avec moi comme artiste. J’ai pris contact avec Jean-Guilhem, le fils de Max, qui m’a dit simplement : “passez me voir à l’occasion”...J’ai acheté mon billet aller-retour pour Montpellier, il m’a reçue et a du comprendre à quel point mon attirance pour l’œuvre était magnétique. Nous avons beaucoup parlé, quand je suis repartie mon projet, chanter Rouquette, s’était renforcé. Projet ? Est-ce qu’on peut encore parler de projet quand on ressent une œuvre de façon aussi inexplicable, viscérale ?”
S’ensuit un long travail sur la prononciation de l’occitan. “Un défi ! Comment situer vos accentuations si spéciales ? Faire avec toutes ces voyelles muettes ? Ne pas rater une diphtongue ?” Encore, en limitant son apprentissage au languedocien du poète, a-t-elle évité l’arrachage de cheveux que notre diversité dialectale n’aurait pas manqué de provoquer !
Max Rouquette, Andrea Zanzotto, Leon Cordes dans un second album
Max mon amour ? Il est possible de voir Cécile évoluer vers un polyamour artistique, peu à peu, puisque sans infidélité au socle de son art, elle se rapproche désormais de cet autre monstre des lettres occitanes qu’est Leon Cordes.
Depuis des semaines elle travaille son texte Lo Boier, dont elle peut maintenant proposer une interprétation. “Mon prochain disque intégrera ce texte, comme celui que consacre Andrea Zanzotto à L’acqua di Dolle,” ou un texte qui parle de Notre Dame des Landes.
“Tout ce qui touche à la nature me touche” concède l’artiste : photographier les campanules dans la forêt de Meudon, ou explorer les racines du Fraisse de Max Rouquette procèdent, pour l’artiste, d’une même logique de l’inexplicable.